Le leadership dans la mentalité française

Publié par Bernard le

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Dernièrement, lors d’une formation sur la préparation du changement dans une entreprise, nous abordions les difficultés liées aux facteurs humains. Il y a énormément d’émotions dans les situations de changements, qu’ils soient importants ou pas. Nous discutions donc de la nécessité d’avoir un leadership adapté. Beaucoup de questions sont alors venues concernant le management et le leadership. Elles montraient la confusion concernant le rôle du manager et le rôle du leadership.

Ce qui est ressorti à un moment, c’est que l’utilisation du mot “leadership” dans la langue française est un peu paradoxale. En effet, il n’est pas vraiment présent dans les dictionnaires français et sa définition sommaire tourne autour du rôle de leader dans le sens d’une position. (Sauf ajout récent. Merci de me le signaler, j’en serais heureux).

Cette absence des dictionnaires explique-t-elle la difficulté du leadership à se manifester face à une vision managériale souvent verticale et autoritaire ?

Le mot leadership dans la langue française

Je donne régulièrement des formations pour des managers dans plusieurs pays africains francophones. Cela dans les secteurs de l’industrie pétrolière, agro-alimentaire, pharmaceutique, et autres. Je constate dans ce cadre que le leadership est un challenge important et il est souvent assez peu développé dans son volet relations interpersonnelles chez de nombreux managers. Cela en particulier dans les entreprises françaises et dans les métiers plus techniques.

J’ignore si le mot a été ajouté récemment dans certains dictionnaires français mais en allant faire quelques recherches sur l’Internet, les définitions sont plutôt pauvres :

  • Larousse : fonction de leader. Position dominante. Et si on regarde à « leader », nulle allusion au manager, mais : Personne qui est à la tête d’un parti politique, d’un mouvement, d’un syndicat. Rien sur le leadership et sur l’entreprise.
  • En cherchant sur Lexilogos qui renvoie à diverses bases de données, très peu de mentions. La seule existante concerne le leadership de groupes, mais rien concernant l’entreprise…
  • Dicocitation-le monde (Littré) : Leader : mot anglais qui signifie le chef et le principal orateur d’un parti politique à la chambre des communes, et qui se trouve souvent dans les récits.
  • Sur www.lalanguefrancaise.com : Position d’une nation ou d’un groupe qui place sous sa mouvance, et parfois sous sa tutelle, une autre nation, un autre groupe. Synonymes partiels : hégémonie, suprématie.
  • Le dictionnaire encyclopédique de l’administration publique au Canada : Le leadership est la capacité de créer une relation émotionnelle véritable avec les membres d’un groupe afin de les amener à transcender leurs besoins individuels au profit d’objectifs communs. Nathalie Rinfret.

Comme on le constate, l’utilisation du mot est surtout liée au caractère dominant d’un groupe ou d’un individu. En particulier, dans les ouvrages français. Le côté « dirigeant » prend le dessus sur les aspects plus liés aux caractéristiques du leadership. L’exception vient du Canada !

Du côté canadien, le mot leadership est utilisé dans son acceptation anglophone liée au processus d’influence et va au-delà de ce côté dirigeant, lié au pouvoir.

Quelles sont les significations de cette relative absence du côté français ?

C’est assez déconcertant de voir cela. En effet, l’absence d’un mot dans une langue veut dire que ce qu’il recouvre « n’existe pas vraiment » dans la mentalité et la culture. Et cela pourrait peut-être expliquer la difficulté qu’ont les managers français (ou éduqués selon le modèle français) à développer le leadership. Explorons cela et surtout laissez moi vos avis dans les commentaires. 

Évolution historique de l’usage du mot « leadership »

Dans Lalanguefrancaise.com, nous trouvons un graphique sur l’utilisation du mot dans la langue française au cours du temps depuis 1700. Cela étant intéressant, nous avons refait les recherches sur Google Ngram pour les langues française et anglaise depuis 1900.

En regardant les courbes ci-dessous, on observe une utilisation environ 6,3 fois moins importante dans la langue française entre 2000 et 2008 (date maximale reprise pour les recherches). Et une utilisation plus importante du mot à partir de 1970 avec une augmentation nette seulement après 1995. En revanche, en anglais, les chiffres sont stables depuis 1965 environ avec un pic un peu supérieur entre 1966 et 1976.

Utilisation du mot leadership dans la langue anglaise

Evolution de la fréquence d’utilisation du mot leadership dans la langue anglaise entre 1900 et 2008.

utilisation du mot leadership dans la langue française

Evolution de la fréquence d’utilisation du mot leadership dans la langue française entre 1900 et 2008.

Source : Google Ngram, application linguistique permettant d’observer l’évolution de la fréquence d’un ou de plusieurs mots ou groupes de mots à travers le temps dans les sources imprimées.

Des auteurs canadiens (Brassard, A. & Lapointe, 2018), ont fait une recherche assez approfondie sur l’utilisation du mot leadership associé à l’exercice de la fonction de dirigeant, dans la littérature (pas limité à la francophonie). Deux significations génériques du concept de leadership ressortent explicitement ou implicitement chez les auteurs : soit le leadership est un exercice d’influence concentré (un leader, des followers), soit il est un exercice d’influence distribué (l’exercice du pouvoir dans les organisations).

Généralement, le leadership est associé dans la littérature à la notion de dirigeant, lié à un poste administratif. Dans les utilisations plus anciennes, il est lié à la fonction ou en fait partie. Par la suite, la notion de leadership se sépare de la fonction administrative pour devenir complémentaire, voire en incompatibilité chez certains auteurs.

On retrouve dans les notions les plus fréquentes l’idée d’influence… Un homme qui influence ses collaborateurs ou l’ensemble de l’organisation.

Cette absence (ou présence limitée), du mot leadership, dans la langue française nous semble expliquer la difficulté qu’ont beaucoup de managers français à intégrer ces compétences liées à l’influence et qui sont liées au côté chaleur du leadership que nous avons développées dans notre article « Qu’est-ce que le leadership ». La position dominante et l’autoritarisme restent très forts.

Tableau descriptif des deux polarités du leadership

Description des deux polarités du Leadership. (Bernard Guévorts)

Le manager-leader, doit posséder un maximum des compétences des deux polarités pour avoir une efficacité maximale aussi bien en termes de gestion qu’en termes de relations interpersonnelles et motivation des équipes.

Que disent les publications plus récentes

En 2008, Pierre Lainey, consultant formateur canadien publie un bel ouvrage, le leadership organisationnel, de la théorie à la pratique, qui reprend les éléments du leadership au niveau individuel, interpersonnel et contextuel. C’est assurément une très belle référence en langue française et une belle base de travail. Son livre reprend l’ensemble des éléments concernant le leadership avec de nombreuses références. On remarque que le leadership au Canada francophone se fond très bien dans une mentalité managériale qui semble similaire à l’anglophone. Il aborde aussi les dérives du leadership avec le leadership dysfonctionnel. Le leader peut être la source des problèmes d’une entreprise quand il ne reconnaît pas ses lacunes. Nous avons vu que ce genre de difficultés est lié à un manque d’intelligence émotionnelle, dans les compétences de prise de conscience de soi.

En 2011, Benjamin Pelletier propose un article sur « Les difficultés pour développer le leadership en France ». En particulier, il montre le regard de 3 expatriés européens en France. Ils soulignent le côté autoritaire, distant du manager et l’aspect plus individuel et interindividuel et moins centré sur l’équipe. Également la notion de devoir convaincre (rationnellement).

Dans la conception française du leadership se glisse donc immédiatement la notion de pouvoir et de distance hiérarchique, d’où l’identification du leader, du meneur d’hommes, à celui qui détient de l’autorité. Benjamin Pelletier Cliquez pour tweeter

Dans la conception française de leadership, dit Pelletier, se glisse donc immédiatement la notion de pouvoir et de distance hiérarchique, d’où l’identification du leader, du meneur d’hommes, à celui qui détient de l’autorité.

En 2013, Daniel Belet parle, dans un article, de la forte tradition hiérarchique et bureaucratique qui existe en France. Il en résulte, dit-il, une « pathologie managériale » qui a été analysée et dénoncée depuis déjà longtemps par de nombreux observateurs, sociologues des organisations et spécialistes du management.

Cela entraîne selon lui et les auteurs cités de nombreuses dérives :

« Ces pratiques managériales et organisationnelles induisent aujourd’hui un nombre croissant de « pathologies managériales » ou dysfonctionnements graves tels qu’un malaise chronique de l’encadrement, un climat de défiance vis-à-vis de la hiérarchie, des risques psychosociaux croissants, une démotivation et un désengagement des salariés, un manque de coopération notamment au sein des équipes de travail, des rivalités et des conflits divers, une ambiance de travail délétère, etc. »

Le plus grave, semble-t-il, et cela je le constate aussi chez les étudiants que je forme et chez de jeunes managers, c’est que l’enseignement des managers reste souvent très en retard sur l’évolution de la littérature et du leadership. Les lacunes restent donc là, même si les concepts évoluent.

L’ouvrage de Éric-Jean Garcia (2013) sur « Le génie du Leadership », montre des aspects assez positifs. Ce livre est basé sur les témoignages de 40 dirigeants et DRH de premier plan, français pour la plupart.

Son objectif est clair : « Cet ouvrage a donc deux objectifs principaux : démystifier l’exercice du pouvoir managérial et attirer l’attention sur les défis et les possibilités du leadership de tous ceux et toutes celles qui ont la responsabilité et le désir de mobiliser des talents et des compétences dans le but de servir un projet commun, ambitieux et générateur de progrès. »

Dans une interview pour Terrafemina, Éric-Jean Garcia répond à la question suivante : qu’est-ce que le leadership ?

Le leadership, c’est une des dimensions du management. On ne peut pas être manager sans leadership, ce serait comme une voiture qui aurait un moteur, mais pas de roues. Le patron de Sanofi a ainsi eu cette phrase très juste pour définir ce qu’est un « un bon leadership » : c’est l’inverse du patron omniscient, c’est faire en sorte que les décisions soient prises au plus bas de l’échelle, sans que la pertinence de celles-ci soit remise en cause”.

C’est donc une vision très positive du leadership dans l’entreprise qui n’a rien à voir avec l’autoritarisme.

Dans une autre question qui lui est posée : Le leadership peut-il s’apprendre ?

Sa réponse est :

Non, il y a une part du leadership qui est liée à notre relation avec les autres. Et celle-ci est très difficile à changer. On peut sensibiliser les individus, on peut faire progresser un potentiel, mais il faut qu’il soit là au départ. C’est très difficile d’apprendre le sens du collectif à 30 ou 40 ans : certains ont des prédispositions, d’autres non. Et c’est d’autant plus difficile à apprendre qu’il n’existe pas de compétences particulières au leadership, si ce n’est une certaine fibre managériale : il faut une capacité à avoir de l’autorité et à être légitime, certes. Mais, comme nous l’avons déjà dit, tous les dirigeants ont des qualités bien différentes en fonction du milieu dans lequel ils évoluent.

Je suis très étonné et beaucoup plus réservé sur cette réponse. En effet, le leadership peut s’apprendre et des compétences ont été identifiées clairement. C’est le cas de celles de l’intelligence émotionnelle, par exemple, dont nous avons déjà parlé. Nous pouvons changer, même si c’est difficile, car nous pouvons apprendre à tout âge, comme nous en avons traité dans cet article.

Si je n’y croyais pas, je ne ferais pas ce métier, et surtout je constate régulièrement en pratique que les personnes peuvent changer et de façon très claire.

Nous voyons que les croyances limitantes à ce niveau sont encore fortes, en particulier chez les plus anciens managers de haut vol. Pour beaucoup de managers, « on naît leader »je suis comme je suisCela justifie juste qu’on ne veut pas changer.

Le leadership anglo-saxon n’a pas ces limitations !

Pour conclure cette revue de littérature, je reprendrai la conclusion du Professeur Jean-Michel Plane en conclusion d’un ouvrage plus récent : Théories du leadership. Modèles classiques et contemporains, Dunod 2015. On y voit une évolution marquante.

« L’ensemble des contributions proposées semble converger vers la thèse suivant laquelle un mode de leadership efficace résulte probablement de la synthèse de plusieurs courants majeurs : le communityship, le partage et le collaboratif, la gestion des émotions, de la diversité des personnes, de comportements déviants et le développement d’une spiritualité voire d’une pleine conscience.

En effet, le leader de demain sera certainement celui qui est capable de se connaître, de maîtriser ses émotions et de « puiser dans sa spiritualité » pour faire face à des situations conflictuelles, complexes ou incertaines dans lesquelles les risques et les menaces existent. »

La mentalité managériale française évolue

On voit donc clairement dans la littérature spécialisée française, l’évolution vers de nouveaux concepts du leadership. En particulier la reconnaissance dans cette notion, des compétences liées au développement personnel et la maîtrise émotionnelle du manager-leader. Nous y reviendrons.

De grosses entreprises ont compris cette évolution. Elles développent maintenant les compétences de leur managers dans les domaines des relations interpersonnelles et de l’intelligence émotionnelle. Il ne s’agit pas de philanthropie, ni d’être gentil avec le personnel, comme je l’entends parfois dire chez certains managers qui se posent des questions là-dessus.

Le lien entre performance et travail d’équipe et bon climat social a été démontré dans diverses études. Un bon leadership donne de l’engagement au travail et cela engendre de la performance.

L'engagement au travail et la performance

Lien entre l’engagement au travail et divers indicateurs de performance.

A cela s’ajoute la démarche de développement durable et de RSE (responsabilité sociétale des entreprises), ce qui entraîne également des attitudes plus respectueuses des hommes et de l’environnement.

Peut-on développer le leadership ?

Oui, j’en suis convaincu ! Et heureusement je ne suis pas le seul. De nombreuses entreprises commencent à voir l’intérêt de cela.

C’est la raison pour laquelle, depuis plusieurs années, je donne régulièrement des formations pour des managers de grandes entreprises dans plusieurs pays africains. C’est le cas du groupe TOTAL, par exemple. Et cela sur les relations interpersonnelles, le coaching des collaborateurs, le leadership et la motivation, etc. Le management a compris l’importance de ces compétences pour la performance et aussi l’image de l’entreprise.

Ce sont des compétences liées à la communication et aux relations interpersonnelles qui vont renforcer le leadership des managers.

Quand je travaille la capacité à présenter une vision avec des managers et à la manière de mobiliser leurs équipes lors de briefing, je peux vous assurer que le leadership peut se développer et que j’en vois les traces.

Cela se voit aussi dans des projets au niveau sociétal et humanitaire. J’ai eu l’occasion de travailler avec des jeunes du Sud Kivu (en 2018), sur le développement de leur leadership et leur capacité à faire des projets pour la paix dans la région.

Là aussi, leurs actions ne laissent aucun doute sur la capacité à développer son leadership pour être impactant dans le monde dans lequel on vit. Que se soit l’entreprise ou la société civile.

Je vous invite à réagir en commentaires. Laissez-moi votre opinion ou expérience dans le cadre du leadership et de son développement dans le management français.

A bientôt

Bibliographie :

Articles :

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Bernard

Apporteur de confiance et éveilleur de leadership. Formateur international en relations interpersonnelles, leadership, développement personnel, prise de parole, formation de formateurs et relation clients. Je suis belge et je vis actuellement au Cameroun la plupart du temps.

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